Skip to main content

Pourquoi les Anglais ont gardé le triple A

Je reproduis un article d'Eric le Boucher paru sur slate.fr. Il s'intitule Leçons Anglaises et il explique très clairement les avantages et les bémols de la politique d'austérité (relative) menée par la coalition de David Cameron.


"Du Royaume-Uni, il est possible de répondre à deux questions posées dans le contexte de l'élection présidentielle en France.
1. Est-il intéressant de quitter l'euro et de dévaluer de 25% sa monnaie, comme l'a été la livre sterling? La réponse est non.
2. Concernant l'austérité, faut-il agir très vite et très fort ou mieux vaut-il attendre, comme le suggèrent les keynésiens, que la conjoncture soit meilleure? La réponse, dans le contexte européen, est que l'austérité immédiate est meilleure.
David Cameron fait mieux que Nicolas Sarkozy. Accessoirement, cela explique pourquoi la Grande-Bretagne a conservé son triple A, contrairement à la France, malgré des résultats aussi mauvais dans les deux pays.

Lors des élections législatives en Grande-Bretagne, il y a deux ans, le déficit budgétaire (11% du PIB) est au centre des débats. Tout tourne autour des nécessaires coups de hache dans les dépenses. Les conservateurs de David Cameron proposent de frapper très fort. Effectifs et salaires de la fonction publique, budgets des ministères... tout y passe sauf la santé. La stratégie politique était claire: faire le ménage rapidement pour que les bénéfices commencent à se voir la quatrième année, celle de l'échéance électorale suivante.

D'un point de vue économique, les choses sont également claires. Annoncer l'austérité avant que les marchés ne vous y conduisent les mains dans le dos est une politique préventive qui paie. Autre avantage, la rigueur fiscale permet à la banque centrale d'être plus accommodante dans sa politique monétaire.

Enfin, les conservateurs veulent engager un changement complet de la croissance britannique, trop tournée vers l'endettement, et donc abaisser la demande (notamment par une hausse de la TVA). Cette chute sera compensée, espèrent-ils, par le regain des exportations, la livre ayant perdu 25 % de la valeur depuis 2007.

David Cameron a été élu. Sa politique est-elle un succès? Non. La croissance est stagnante (0,7% ou 0,9% attendu cette année après une récession au creux de l'hiver), le chômage est en hausse dangereuse, à 8,4%, le déficit est encore de 8% en 2011.

Le premier ministre a été pris, comme tout le monde, dans la rechute mondiale sensible depuis le printemps dernier et dans la crise de la zone euro. Conséquence: la demande interne a effectivement baissé. La hausse de la TVA (de 17,5% à 20% au 1er janvier 2011) a ajouté ses effets à celle du prix de l'essence pour donner une inflation de plus de 5%. Comme les salaires étaient contenus, la consommation a reculé.
La déception vient des exportations: rien n'a bougé. La dévaluation n'a pas eu d'effet. Pourquoi? Le gouvernement accuse le plongeon de la zone euro, qui reste le principal client (40% des ventes). Sans doute, mais on ne vend que ce qu'on fabrique: la Grande-Bretagne exporte des services (dont la finance, mais son activité est en fort recul), mais elle dispose d'une base industrielle trop réduite et pas assez musclée pour l'export.

Et les investissements restent décevants: pourquoi bâtir des capacités quand il y en a déjà trop en Europe? Pour la France, qui rêve de réindustrialisation, la leçon anglaise s'appelle prudence. Cela prend du temps. Optimistes à leur habitude, les Britanniques disent encore au moins deux ou trois ans.
Entre-temps, l'économie souffre et les effets de la crise ne s'effacent pas...

Mais l'austérité a convaincu les marchés. «Le gouvernement a réussi à crédibiliser sa politique budgétaire», assure Nick Bate, de Bank of America Merrill Lynch. Sa Majesté a conservé son triple A et le Trésor britannique paie des taux d'intérêt aussi bas que les Allemands. Et ce malgré le déficit persistant. La politique de la Banque d'Angleterre d'achat des titres d'Etat l'explique en grande partie. Mais cette prouesse en dit long sur les énormes avantages d'être préventif... comme, aussi, sur la cote d'amour des investisseurs de la City pour le pays qui les accueille.

En vérité, si la conjoncture mondiale ne s'était pas rétablie (à la suite des Etats-Unis) depuis deux mois, David Cameron, dans la récession, aurait eu bien du mal. Heureusement, tout s'améliore un peu à l'extérieur comme à l'intérieur avec une inflation qui reculera à 2 % fin 2012. Les ménages soulagés, la consommation restera le moins poussif moteur de l'économie britannique.

Comments

Popular posts from this blog

What is the natural order hypothesis?

The natural order hypothesis states that all learners acquire the grammatical structures of a language in roughly the same order. This applies to both first and second language acquisition. This order is not dependent on the ease with which a particular language feature can be taught; in English, some features, such as third-person "-s" ("he runs") are easy to teach in a classroom setting, but are not typically fully acquired until the later stages of language acquisition. The hypothesis was based on morpheme studies by Heidi Dulay and Marina Burt, which found that certain morphemes were predictably learned before others during the course of second language acquisition. The hypothesis was picked up by Stephen Krashen who incorporated it in his very well known input model of second language learning. Furthermore, according to the natural order hypothesis, the order of acquisition remains the same regardless of the teacher's explicit instruction; in other words,

What is skill acquisition theory?

For this post, I am drawing on a section from the excellent book by Rod Ellis and Natsuko Shintani called Exploring Language Pedagogy through Second Language Acquisition Research (Routledge, 2014). Skill acquisition is one of several competing theories of how we learn new languages. It’s a theory based on the idea that skilled behaviour in any area can become routinised and even automatic under certain conditions through repeated pairing of stimuli and responses. When put like that, it looks a bit like the behaviourist view of stimulus-response learning which went out of fashion from the late 1950s. Skill acquisition draws on John Anderson’s ACT theory, which he called a cognitivist stimulus-response theory. ACT stands for Adaptive Control of Thought.  ACT theory distinguishes declarative knowledge (knowledge of facts and concepts, such as the fact that adjectives agree) from procedural knowledge (knowing how to do things in certain situations, such as understand and speak a language).

La retraite à 60 ans

Suite à mon post récent sur les acquis sociaux..... L'âge légal de la retraite est une chose. Je voudrais bien savoir à quel âge les gens prennent leur retraite en pratique - l'âge réel de la retraite, si vous voulez. J'ai entendu prétendre qu'il y a peu de différence à cet égard entre la France et le Royaume-Uni. Manifestation à Marseille en 2008 pour le maintien de la retraite à 60 ans © AFP/Michel Gangne Six Français sur dix sont d’accord avec le PS qui défend la retraite à 60 ans (BVA) Cécile Quéguiner Plus de la moitié des Français jugent que le gouvernement a " tort de vouloir aller vite dans la réforme " et estiment que le PS a " raison de défendre l’âge légal de départ en retraite à 60 ans ". Résultat d’un sondage BVA/Absoluce pour Les Échos et France Info , paru ce matin. Une majorité de Français (58%) estiment que la position du Parti socialiste , qui défend le maintien de l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans,